Curieuses momies !

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> Momie de femme, dite la "petite momie" (Ier siècle av. J.-C. - IVe s. apr. J.-C.). Cette momie de femme, dite « petite momie » en raison de sa taille (1,57 m), est étudiée à Grenoble dans les années 1810 par Jean-François Champollion. « Les chairs mélangées avec le baume ne forment point une masse solide et compacte ; elles sont au contraire tombées entièrement en poussière[s] fraiches », observe-t-il après démaillottage. La momie porte les traces d’un examen hâtif, sans doute effectué par des pilleurs de tombes.
Momie de femme, dite la "petite momie" (Ier siècle av. J.-C. - IVe s. apr. J.-C.). Cette momie de femme, dite « petite momie » en raison de sa taille (1,57 m), est étudiée à Grenoble dans les années 1810 par Jean-François Champollion. « Les chairs mélangées avec le baume ne forment point une masse solide et compacte ; elles sont au contraire tombées entièrement en poussière[s] fraiches », observe-t-il après démaillottage. La momie porte les traces d’un examen hâtif, sans doute effectué par des pilleurs de tombes. © E.Lacroix - Musée de Grenoble

Publié le : 28 mars. 2025

Objets de fascination depuis l’Antiquité, les momies égyptiennes sont aussi de captivants sujets d’études scientifiques. Des Champollion au Synchrotron, le musée Champollion, à Vif, lève un coin des bandelettes dans une passionnante exposition.

Et si on « allait aux momies » ? L’expression fait florès à l’époque des frères Champollion, au XIXe siècle. Aiguisée par les récits des voyageurs qui, depuis l’Antiquité, parcourent la plaine de Saqqarah, en Égypte, la fascination pour ces corps embaumés atteint son paroxysme après l’expédition de Bonaparte, jusqu’à devenir une attraction touristique courue. Les momies humaines ou animales foisonnent : chacun rapporte la sienne ou au moins un fragment (main, pied ou tête) pour son cabinet de curiosités personnel.

Les collectionneurs ne se privent pas de retirer leurs bandelettes en vue de découvrir leurs secrets. Ils ne sont pas les premiers : depuis le Moyen Âge, la poudre de momie (obtenue à partir de grattage des bandelettes, enduites d’un mélange bitumineux) ou « mumia » intègre nombre de préparations-miracles chez tous les bons apothicaires. Des peintres célèbres, tels le Caravage ou Delacroix, l’utilisent quant à eux comme pigment… Jusqu’au siècle dernier, elle servira même d’engrais !

Momie de rapace. L’imagerie en 3D révèle que la tête de cette momie de rapace de 30 cm ne contient en réalité qu’un jeune oisillon marin de 5 cm. La tête de buse a été fixée au moyen d’une tige végétale. Un montage qui fait suspecter un ajout tardif de la tête à une momie plus ancienne, pour augmenter sa valeur marchande. © Ph. Candegabe - Museum Ville de Grenoble

Les momies n’ont pas tout dit

À partir du XVIIIe siècle, les objets et rituels funéraires des Égyptiens deviennent en parallèle un vrai sujet d’études scientifiques. Les frères Champollion, à Grenoble, n’échappent pas à cette soif de connaissances.

Parmi les 70 objets rassemblés dans la maison familiale de Vif pour cette nouvelle exposition temporaire, on découvre ainsi une momie de femme « débandelettée » par Jean-François à Grenoble et une momie d’enfant qu’il a rapportée d’Égypte, pour le musée du Louvre. Il sera le premier à comprendre l’usage funéraire des vases canopes. Les deux savants sont aussi régulièrement invités à ces séances spectaculaires d’ « ouverture de momies », en vogue dans une société mondaine avide de frissons. Chacun repart avec son bout de bandelette ou son fragment… 

Cent cinquante ans plus tard, à l’heure où l’exposition et la conservation des restes des défunts font débat, les pratiques ont évolué. Plus question de déshabiller les momies : soumises au puissant rayonnement synchrotron à Grenoble, scannées en trois dimensions, elles sont scrutées au plus intime, révélant parfois des surprises… tel ce rapace qui cache un corps d’un oisillon rembourré !

Depuis 1976, le procédé d’irradiation par rayons gamma mis en place au laboratoire ARC-Nucléart, à Grenoble, pour le sauvetage de la royale momie de Ramsès II s’est aussi imposé. Anthropologie, entomologie, physique, histoire… les études se poursuivent et réservent d’autres découvertes, dans le respect des corps et des croyances. Trois millénaires plus tard, la curiosité pour les momies reste entière.

Test d'irradiation sur une momie égyptienne du Musée des Beaux-Arts de Grenoble. De nombreuses momies du musée de Grenoble ont servi de « cobayes » en 1977 pour subir des tests d’irradiation aux rayons gamma, avant d’appliquer ce traitement à la momie royale de Ramsès II. Le sauvetage de la dépouille momifiée du pharaon a contribué à la notoriété internationale du laboratoire grenoblois. © Arc Nucléart

Pratique

« Curieuses momies. Des Champollion au Synchrotron. »

Du 28 mars au 28 septembre 2025.

Au musée Champollion : 1, rue du Portail-Rouge, à Vif. Entrée gratuite.

Pour prolonger la visite :

  • Procurez-vous le catalogue d’exposition (en vente à la boutique du musée).

Contact : 04 57 58 88 50.

Plus d'informations

Mais aussi…

Conjuguez sport et culture le 24 juillet. Le Tour de France cycliste sera à Vif pour le départ de la 18e étape Vif-Courchevel. Toute la journée, un programme exceptionnel d’animations sera organisé au musée Champollion comme au centre-bourg de la cité vifoise.

18e étape du Tour de France

Christian de Tassigny, ingénieur physicien

Christian de Tassigny, ingénieur physicien du CEA et cofondateur du laboratoire Arc Nucléart à Grenoble, a joué un rôle clé dans le sauvetage de la momie de Ramsès II.

Par: Véronique Granger