Isère : quel tourisme pour demain ?

Refuge du Crozet

Changement climatique, saisonnalité marquée, nouvelles attentes des visiteurs et des habitants... En Isère comme ailleurs, le tourisme est confronté à des défis cruciaux. Explications...

L’Isère offre une carte postale idéale, avec ses beaux paysages de plaines, ses sommets de rêve, ses nombreux lacs, une vingtaine de stations de ski, sa large palette d’activités de pleine nature et son foisonnement culturel. Autant d’atouts qui font de l’Isère un territoire de tourisme.

Des atouts à faire valoir

© F.Vandecandelaere

Ce secteur représente 7 % de l’économie du département : avec près de 28 000 emplois et 1,43 milliard d’euros de chiffre d’affaires, il permet à de nombreux Isérois de vivre et « travailler au pays ». Pour les territoires de montagne, l’enjeu touristique est encore plus crucial : sur 23,4 millions de nuitées enregistrées en 2023, 60 % sont en hiver.

Ce tourisme est toutefois en pleine mutation : l’évolution des attentes des visiteurs, les préoccupations des riverains et bien sûr la prise en compte du réchauffement climatique rebattent les cartes.

Besoin d’évasion, de se reconnecter avec la nature, de vivre des expériences plus authentiques et intimes, de se déplacer autrement, en itinérance, dans le respect de l’environnement : les voyageurs aujourd’hui n’aspirent pas forcément à partir loin, mais à se dépayser hors des sentiers battus et des grands complexes hôteliers…

L’engouement pour les grands espaces, les sites naturels et les activités de pleine nature peuvent conduire ponctuellement à des conflits d’usages voire des incivilités. Des pics de fréquentation, observés sur les spots les plus médiatisés et « instagrammables », mettent en lumière la nécessité de réguler à certaines périodes les flux de visiteurs et de protéger les espaces naturels fragiles.

“Nous devons travailler à mieux diversifier et répartir l’offre touristique dans le temps et dans l’espace, sachant que beaucoup de territoires méritent d’être mieux connus et valorisés. Les habitants doivent être considérés comme les premiers bénéficiaires des politiques touristiques : l’embellissement des paysages et du bâti, la présence d’équipements de sport, de loisirs et d’une offre culturelle dynamique… tout cela participe à l’amélioration de notre cadre de vie”.

Christophe Suszylo

Vice-président en charge du tourisme et de l’attractivité au Département de l’Isère

L’environnement au cœur des enjeux

© T. Garcia

L’état des lieux réalisé par le Département, en préalable à l’élaboration de son nouveau « schéma du tourisme et de la montagne » avec les socioprofessionnels et les élus locaux, a permis de faire ressortir les spécificités et les atouts propres à chaque territoire, en plaine comme en altitude.

Sur la base de cette vision partagée, des pistes d’action concrètes ont d’ores et déjà été tracées en faveur d’un tourisme durable et accessible à tous.

La prise de conscience de l’impact environnemental du tourisme implique de mieux intégrer cette dimension dans les projets d’aménagements. Décarbonation des transports, gestion de l’énergie et des ressources ainsi que des déchets...

Autant de sujets sur lesquels le Département s’est déjà engagé en lançant, par exemple, une étude prospective sur la ressource en eau, en concevant des offres touristiques sans voiture, mais aussi en sensibilisant les jeunes, les visiteurs et les pratiquants à la cohabitation des usages et la préservation des milieux naturels.

En montagne, où l’impact du réchauffement est encore plus prégnant, la transition est devenue une urgence. Si les massifs sont engagés dans une démarche de diversification de leur offre d’activités, des stations de moyenne montagne sont en sursis. La vitalité de ces territoires est en jeu.

Pour Nathalie Faure, vice-présidente déléguée du Département en charge de la montagne, “il n’y a pas un modèle unique pour la montagne : les investissements futurs doivent tenir compte de la situation propre à chaque station-village selon son altitude, son modèle économique et ses atouts.”

Le tourisme de demain sera celui que nous inventerons ensemble.

Repères

Changement climatique, saisonnalité marquée, nouvelles attentes des visiteurs et des habitants... Le tourisme en Isère comme ailleurs est confronté à des défis cruciaux pour l’avenir de ce secteur.  De nouvelles valeurs émergent, mettant en avant l’identité locale, le respect de l’environnement et la déconnexion en pleine nature.

Pour le Département, ces défis constituent aussi une opportunité pour poser encore davantage les bases d’un tourisme durable et responsable, au profit des Isérois comme des touristes. Avec sa mosaïque de paysages de plaine et de montagne, ses vastes espaces naturels, son offre culturelle importante, sa dynamique sportive axée sur les pratiques en pleine nature et ses nombreux produits du terroir, l’Isère a toutes les cartes en main.

Conforter et pérenniser l’offre en s’adaptant aux particularités de chaque territoire, au service d’un développement harmonieux et respectueux de l’environnement : telles sont les ambitions du nouveau schéma départemental du tourisme et de la montagne, adopté à l’unanimité en septembre dernier par les conseillers départementaux.

Inventer un tourisme durable et accessible

Christophe Suszylo

Vice-président du Département en charge du tourisme et de l’attractivité, président d’Isère Attractivité.

IsèreMag

Le Département vient d’adopter son schéma du tourisme et de la montagne. Quelles sont les grandes orientations de cette politique touristique pour les années à venir ?

Christophe Suszylo

Ce schéma ne propose pas de recettes toutes faites, mais une feuille de route pour les acteurs des territoires, un principe de sur-mesure en quelque sorte, mais avec un canevas qui fixe un cap.À travers ce schéma, nous voulons promouvoir un tourisme accessible et durable, qui s’adresse autant aux habitants qu’aux visiteurs. Ce qui implique un développement harmonieux et respectueux de l’environnement.Aujourd’hui, 40 % des Français ne partent pas en vacances et les Isérois sont les premiers à choisir la destination Isère. Nous devons leur proposer une offre attractive et conforme à leurs attentes, m...

Nathalie Faure

Vice-présidente déléguée du Département en charge de la montagne

IsèreMag

Le schéma tourisme et montagne fait le pari d’une solidarité territoriale entre les territoires de montagne : comment cela va-t-il se traduire ?

Nathalie Faure

La solidarité et l’entraide sont naturelles en montagne, un milieu difficile où nous avons tous des intérêts communs. Le premier est de pouvoir vivre et « travailler au pays » toute l’année. Au sein d’un même massif toutefois, il existe des situations très contrastées d’une station à une autre en termes d’accessibilité, de démographie et de dépendance à l’économie de la neige. Jusqu’à présent, le Département répondait aux projets d’investissement exprimés par les communes ou intercommunalités. À partir de 2025, notre aide sera apportée au cas par cas et conditionnée à une vision stratégique et part...

Christophe Suszylo

Vice-président du Département en charge du tourisme et de l’attractivité, président d’Isère Attractivité.

IsèreMag

Le Département vient d’adopter son schéma du tourisme et de la montagne. Quelles sont les grandes orientations de cette politique touristique pour les années à venir ?

Christophe Suszylo

Ce schéma ne propose pas de recettes toutes faites, mais une feuille de route pour les acteurs des territoires, un principe de sur-mesure en quelque sorte, mais avec un canevas qui fixe un cap.

À travers ce schéma, nous voulons promouvoir un tourisme accessible et durable, qui s’adresse autant aux habitants qu’aux visiteurs. Ce qui implique un développement harmonieux et respectueux de l’environnement.

Aujourd’hui, 40 % des Français ne partent pas en vacances et les Isérois sont les premiers à choisir la destination Isère. Nous devons leur proposer une offre attractive et conforme à leurs attentes, mais aussi bénéfique à leur cadre de vie.

IsèreMag

Comment s’est élaboré ce schéma ?

Christophe Suszylo

Nous partageons la compétence tourisme avec différents acteurs comme la Région et les communautés de communes avec qui nous avons travaillé longuement pour définir une stratégie partagée. Les partenaires publics et privés de chaque territoire ont été étroitement associés. Après une phase d’audit, des orientations ont été définies avec des actions à mener. 

Nathalie Faure

Vice-présidente déléguée du Département en charge de la montagne

IsèreMag

Le schéma tourisme et montagne fait le pari d’une solidarité territoriale entre les territoires de montagne : comment cela va-t-il se traduire ?

Nathalie Faure

La solidarité et l’entraide sont naturelles en montagne, un milieu difficile où nous avons tous des intérêts communs. Le premier est de pouvoir vivre et « travailler au pays » toute l’année. Au sein d’un même massif toutefois, il existe des situations très contrastées d’une station à une autre en termes d’accessibilité, de démographie et de dépendance à l’économie de la neige. Jusqu’à présent, le Département répondait aux projets d’investissement exprimés par les communes ou intercommunalités. À partir de 2025, notre aide sera apportée au cas par cas et conditionnée à une vision stratégique et partagée, cohérente à l’échelle d’un territoire : par exemple, nous ne financerons pas une nouvelle luge sur rail s’il en existe déjà une à proximité. Nous apporterons en revanche nos compétences pour aider les petites stations à étudier la faisabilité et la pertinence de leurs projets structurants et les possibilités de financement.

IsèreMag

La moyenne montagne est très impactée par le changement climatique. Comment accompagner les stations dans cette transition nécessaire ?

Nathalie Faure

Là aussi, une vision à long terme est indispensable : il n’est pas question de développer le ski à outrance, mais nous continuerons d’investir là où nous savons que la neige pourra se maintenir dans les années à venir.

Aujourd’hui, nous avons besoin des revenus des remontées mécaniques qui contribuent au financement de la transition. L’autre grand changement, c’est de placer les habitants concernés au cœur de cette réflexion : pour l’aménagement de la montagne, la stratégie touristique doit impérativement intégrer les enjeux liés à la préservation de l’environnement et à la qualité de vie.